L’ACHAT MALIN GAGNE DU TERRAIN

Publié le 5 novembre 2025

Lors d’une prise de parole à l’agence sur les pressions que subit la grande distribution, Philippe Goetzmann nous avait expliqué que, si le pouvoir d’achat a certes augmenté au global, par unité de consommation il est resté stable.

Evolution du pouvoir d'achat des ménages

Dans le même temps, cette stagnation du revenu disponible continue de s’accompagner d’une hausse des dépenses incompressibles et d’une montée en puissance de nouvelles catégories de besoins, créant une pression constante sur les ménages.

Evolution du budget des ménages

Conséquence, une part croissante de la classe moyenne, est de plus en plus contrainte. Et pour 80 % des Français, toute augmentation des prix entraîne un arbitrage immédiat. Soit ils achètent moins, soit ils achètent moins cher.

Les distributeurs l’ont bien compris et multiplient les prises de parole pour faire valoir leur action sur les prix, leur sur-performance voire même, leur supériorité.

Le prix est partout

Une situation qui entraîne notamment un resserrement des prix entre les enseignes les plus chères et les deux moins chères.

Mais pour bon nombre de consommateurs, ça ne suffit pas !

LE CONSOMMATEUR / DISTRIBUTEUR

On l'observe déjà depuis pas mal de temps, pour se redonner des marges de manoeuvre budgétaire, le consommateur se mue en distributeur.

Il ne veut plus simplement être le « payeur » et se voit de plus en plus en « vendeur ». Une récente chronique de Constance Vilanova sur France Info (à écouter ici), nous parlait de Virgil Dutilleul, 17 ans, qui a quitté le lycée pour se consacrer à la revente sur TikTok. L’exemple d’une génération qui apprend très tôt à se vendre, à négocier… voire à gérer un petit business pour se créer son propre pouvoir d’achat. La même chronique donnait ce chiffre : « en 2021, les ados gagnaient en moyenne 28 euros par mois via Vinted, selon une étude menée par Kard, une néobanque destinée aux adolescents de 10 à 18 ans ».

Le consommateur ne veut plus être obligé d'attendre une revalorisation de son pouvoir d'achat ou une promesse de prix bas. Il élargit ses sources de revenus. Il vend directement. Il revend avant d’acheter. Il achète pour spéculer (resell économy). Il est un jour consommateur, un autre distributeur, d’abord utilisateur et de plus en plus souvent intermédiaire. Et cette tendance, déjà bien installée, ne cesse de trouver de nouveaux développements. Un récent post d’Olivier Dauvers donnait ce chiffre étonnant : la livraison collaborative (Shopopop, Tut Tut ou AlloVoisins…) dépasserait les 800 M€ de CA ! (à retrouver ici)

Description du fonctionnement de Tut Tut

POURQUOI PAYER PLUS QUAND ON PEUT PAYER MOINS ?

Ce qui est peut-être un peu plus nouveau, c’est cette montée en puissance de l’achat malin. Acheter malin c’est devenu smart. C’est l’expression d’un retour drastique à la valeur réelle. Il suffit par exemple de voir le succès des « dupes » chez ALDI pour s’en convaincre.

Acheter malin c'est smart

L’achat malin, c’est désormais la marque de ceux qui savent déjouer les pièges du marketing et de la société de consommation.

L'achat malin gagne du terrain

Et le succès des plateformes de bons plans, témoigne du goût qu'ont les consommateurs à "jouer" à retrouver du pouvoir d'achat.

Le succès des plateformes de bons plans

Lors du récente étude quantitative que l'agence a mené avec Made In Survey auprès de 800 personnes, trois chiffres nous ont interpellés :

  • Pour 94% des personnes interrogées, acheter malin, cela veut dire acheter moins cher pour la même qualité.
  • Pour 95%, c’est même une question de bon sens .
  • Et pour 87%, les gens qui achètent malin le font pour mettre l’argent qu’ils économisent dans ce qui leur fait plaisir. On est bien loin d'une nécessité absolue.

Quant à ceux qui pensent que l’achat malin est l’expression d’une forme de radinerie, ils vont en avoir pour leur argent. Car c'est seulement 9% des interviewés qui pensent que les gens qui achètent malin sont des radins. Et 17% que c'est une activité réservée au plus démunis. Il suffit de se balader dans les allées d’ACTION, B&m, Normal ou Centrakor pour réaliser qu’acheter malin c’est pas une histoire de CSP.

C'est devenu une pratique et une aspiration transclasses. 89% des 800 personnes interrogées considèrent qu’aujourd’hui ça concerne tout le monde, aisés comme moins aisés.

Bref, si le consommateur continue à profiter des promotions car elles lui sont indispensables, il n’attend plus le bon vouloir des distributeurs ou la prochaine augmentation pour retrouver des marges de consommation.

Il prend son pouvoir d'achat en main. Il crée ses propres places de marché, sa propre économie parallèle. Il contourne les circuits classiques. Il invente et ce faisant, prend de court les distributeurs. Et plus que jamais, il s'émancipe du quand dira t'on et remet en cause certaines certitudes. Ça avait commencé avec AIRBNB et UBER qui lui avaient fait la démonstration qu’exiger ne coutait pas forcément plus cher. Qu’on pouvait avoir de meilleures prestations pour un meilleur prix. Ça s'exprime aujourd'hui avec cette valorisation de l'achat malin. Bref, comme toujours, le consommateur s’adapte !

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